comportementaliste canin

Témoignage d’Eric, comportementaliste canin

La relation homme-chien est parfois complexe et source d’incompréhensions. A travers le témoignage d'Eric, comportementaliste canin, vous en apprendrez plus à ce sujet.

Bien sûr nous adorons tous notre chien, et parfois l’amour que nous avons pour notre compagnon à quatre pattes nous amène à laisser passer des comportements inadaptés ou à avoir une relation faussée.
Nous avons donc interrogé un comportementaliste canin qui nous a expliqué en détail son métier et nous a raconté l’aide qu’il apportait dans la relation maître-chien.

Bonjour, pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?

Je suis Eric BONNEFOI, Relatiologue© Comportementaliste canin et j’interviens sur les questions comportementales à la demande des maîtres sur les bases d’une approche systémique des comportements du chien. J’observe et décris ces comportements à travers la relation avec les maîtres, la qualité de la communication, le tempérament du chien et son environnement.
Je suis diplômé de l’Université ParisV Descartes en relation homme-animal et formé en psychologie, en éthologie et en pratique de psychologie systémique.
Je suis l’auteur de plusieurs ouvrages dont le dernier a reçu le prix Théodule Daubigny remis par les membres de l’Académie vétérinaire de France et le Groupement des écrivains médecins. Je suis par ailleurs l’auteur de plusieurs ouvrages spécifiques sur le comportement canin.
Mon objectif à travers mes travaux et ouvrages est de mettre à disposition suffisamment d’informations afin de rendre les maîtres les plus autonomes possible. La relation entre un maître et son chien est de l’ordre de l’intime et les maîtres sont donc les mieux placés pour créer le cadre idéal de l’harmonie à condition qu’on leur explique ce qui le constitue.

1. Qu’est-ce qu’un comportementaliste canin ? Y a-t-il des différences avec les métiers d’éducateur canin ou de maître chien ?

Un comportementaliste canin est un thérapeute de la relation entre le chien et son maître. Il n’est ni le psy du chien et encore moins celui des maîtres. Il aide à ce que l’harmonie s’établisse dans le respect de la différence des espèces.
Sous réserve d’examens cliniques par un vétérinaire assurant qu’il n’existe pas d’origine médicale ou anatomique au comportement, il aborde les comportements comme l’expression visible d’éléments qui trouvent leurs origines dans le tempérament ou l’histoire du chien, dans l’influence de la relation établie avec les maîtres et dans l’environnement de vie. Même si son objectif est de modifier certains comportements décrits comme gênants par les maîtres, il le fait en intervenant sur la cause et les motifs du comportement, très rarement sur le comportement lui-même. Son travail consiste donc en une analyse précise et argumentée des éléments qui sont à l’origine du comportement et en une proposition adaptée du processus nécessaire permettant les changements voulus. Il intervient en étroite collaboration avec les maîtres, qui sont les seuls, en tant que maîtres, à pouvoir mettre en œuvre le processus définit.

La différence essentielle avec l’éducateur canin, qui ne l’oublions pas est un dresseur, concerne l’approche et l’objectif à atteindre.
L’éducation canine cherche à apprendre au chien à répondre à des consignes ou à exécuter des ordres que peut lui donner son maître. L’éducateur utilise pour cela des outils propres à sa discipline sur la base de récompenses quand le chien répond correctement à une demande.
Son intervention se fait directement sur le chien dans un premier temps puis ensuite via le maître qui pourra ensuite être autonome dans sa conduite de consignes avec son chien.
L’essentiel des apprentissages et consignes standards peuvent être appris ainsi. Couché, assis, le rappel, mais aussi des choses plus complexes comme le rapport d’objet ou de gibier, la recherche d’objet, etc. Tous ces apprentissages passent par des méthodes spécifiques et n’ont qu’un seul objectif, obtenir ce que l’on attend du chien dans une situation précise suite à un ordre ou une consigne donnée.

Le maître-chien quant à lui est un professionnel qui travaille avec un chien. Il utilise un chien de travail dressé à certaines missions, recherche, pistage, sauvetage, garde etc. Il peut être compétent pour dresser lui-même son chien ou être utilisateur d’un chien dressé spécifiquement. Certaines activités nécessitent de très long mois de dressage et des techniques très spécifiques. Il est nécessaire qu’existe une très grande proximité, voir complicité, entre le maître et son chien pour que le travail attendu soit efficace et que le chien puisse donner le meilleur de lui-même.

2. Que pensez-vous du dressage et de l’éducation canine ?

Comme nous l’avons déjà évoqué, éduquer son chien et dresser son chien sont une seule et même activité. Le terme de dressage étant souvent associé aux animaux sauvages ou à des techniques spécifiques alors que l’éducation canine correspond plus généralement au travail de dressage du chien de compagnie. Mais l’approche et les objectifs sont les mêmes, faire répondre positivement un animal à une demande ou consigne imposée par l’humain.

Je considère que l’éducation canine est utile et même parfois nécessaire notamment pour apprendre à son chien des consignes qui permettent d’éviter qu’il soit lui-même en situation de danger. Savoir stopper son chien lorsqu’on croise une route est essentiel. Tant que l’objectif est celui de l’apprentissage de consignes cette activité est donc utile et nécessaire.

Ou cela pose problème, c’est quand il y a mélange des genres et que l’on trouble le message à destination des maîtres. Faire intervenir un dresseur pour chercher à faire moins aboyer un chien, à le rendre moins agressif ou encore à faire baisser son stress ou son anxiété, est un problème et ceci peut même être dangereux. En effet, là où le comportementaliste canin intervient sur l’origine du comportement, le dresseur va chercher à éteindre ou à modifier le comportement. Or, comme tous les comportements ont un sens pour le chien, lui apprendre à stopper un comportement qui par exemple est une communication canine essentielle est dangereux. Par exemple, vouloir empêcher par le dressage qu’un chien grogne est une erreur dramatique. Si un chien grogne, il a un motif canin. Ce comportement a un sens, celui d’informer celui à qui il est destiné de l’imminence potentielle d’une agression. Si par le dressage on cherche à interdire au chien de grogner, on lui interdit de communiquer par le seul comportement qu’il connaît dans une situation précise. Obéissant à la consigne, il ne grognera plus mais si le motif de sa communication d’agression existe alors il passera directement au comportement suivant, à savoir l’attaque et la morsure sans plus prévenir.
Cet exemple vaut pour tous les comportements du chien qui sont de l’ordre d’une réponse éthologique de ce dernier à une situation, un environnement, une rencontre, etc.
Il faut donc être clair avec les maîtres : le dressage est utile pour apprendre des consignes ou des ordres, mais il est à proscrire comme recherche de modification de comportements dont l’origine n’a pas été clairement établie.
Autrement dit, le dressage ne doit pas être le premier réflexe face à un comportement qui questionne.

Dans l’idéal, en cas de doutes, voici l’ordre dans lequel il faut faire appel à un professionnel face à un comportement.
 
1. Faire appel au vétérinaire pour s’assurer qu’il n’existe pas de cause médicale au comportement observé.
2. Faire appel au comportementaliste canin pour s’assurer que le comportement n’est pas en lien avec des éléments sociaux, psychologiques ou relationnels.
3. Faire appel à l’éducateur canin si l’on veut apprendre un nouveau comportement de façon précise et efficace à son chien, par exemple revenir au rappel.
 
Cet ordre est logique et ne répond à aucune idée corporatiste. En tant que comportementaliste il m’arrive très régulièrement de renvoyer vers un éducateur si les maîtres ont une demande de dressage. Je ne considère pas avoir la compétence requise pour le dressage.
Cet ordre permet d’être efficace en cas de difficulté avec son chien. Faire intervertir dans le désordre peut faire souffrir et perturber le chien et malheureusement très souvent aussi mettre en danger les humains. Personne ne fait appel à un ophtalmologiste quand il ressent des douleurs de ventre.

Chaque métier (éducation canine, comportementaliste canin, dressage), bien pratiqué, avec sérieux et compétence a sa place pour accompagner les maîtres dans leur gestion des problèmes avec leur chien et en tant que professionnel chacun doit respecter et faire respecter cet ordre, c’est une question d’éthique.

3. Pour quelles raisons les familles vous contactent-elles ? Quelle est votre principale méthode de travail ?

L’essentiel des demandes de consultations concerne des questions de comportements d’asociabilité avec les autres chiens, avec les humains, mais aussi des comportements de stress et d’anxiété, de désobéissance, d’agression, de problème lors des absences ou encore simplement d’incompréhension des comportements du chien.
Mon approche de comportementaliste canin consiste à définir ce qui dans l’environnement, la relation et le tempérament du chien peut être à l’origine du comportement décrit.
Pour l’essentiel c’est la forme de la relation sociale entre les maîtres et le chien qui est la principale cause des comportements gênants des chiens de compagnie.
Il faut noter que même si les gens se sentent très informés sur les éléments sociaux à mettre en place avec leur chien, finalement ils n’y arrivent pas seuls car les messages sont très nombreux, parfois contradictoires, les trucs et astuces pullulent, mais rares sont les véritables outils d’aide à leur disposition pour s’assurer de faire bien.
Ma méthode consiste donc à définir et analyser les disfonctionnements à travers une exploration et une écoute thérapeutique, à apporter des explications sérieuses utiles et à proposer en fonction des capacités et de la sensibilité de chacun la mise en place d’un mode relationnel et environnemental qui permettra l’amélioration.

4. Quels sont les troubles du comportement que vous rencontrez le plus souvent ?

A vrai dire il n’existe que très peu de véritables troubles du comportement. Ils sont même souvent du domaine du traitement médical et donc d’une prise en charge vétérinaire.
En fait, ce que les gens nomment troubles est un comportement standard du chien, parfois exagéré mais qui gêne ou dérange les maîtres. C’est tout à fait différent.
Qu’un chien aboie quand le facteur passe n’est pas un trouble du comportement ! Qu’un chien morde pour défendre sa nourriture non plus, pas plus que de courir derrière un chat qui court devant lui. Je pourrais en citer ainsi beaucoup d’autres.
Si ces comportements sont exprimés, ils ont un sens pour le chien et sont la plupart du temps adaptés à ce qu’il est, vit et a appris.
Ceci ne veut pas dire qu’il ne faut pas chercher à modifier les comportements mais ils ne peuvent être abordés comme des troubles comportementaux. Considérons-nous qu’une personne qui parle très fort et beaucoup montre un trouble du comportement ? Je ne l’espère pas ! Peut-être que la personne entend mal, que personne ne l’écoute, qu’elle n’a pas souvent l’occasion de s’exprimer, rien d’autre qu’un comportement adapté à cette personne. Ceci peut être gênant pour d’autres mais qualifier ses comportements de troubles du comportement est une erreur. C’est pour cela que pour modifier un comportement il faut en comprendre les vrais motifs, l’origine et le niveau, afin de pouvoir apporter la bonne réponse. Qualifier les comportements gênants de troubles est une « pathologisation » facile. Ces dernières années, en Amérique du Nord, la tendance à qualifier des comportements d’enfants d’hyperactivité a conduit des milliers d’enfants à être médicamentés. Il existe bien entendu de vrais motifs à traiter certains comportements de troubles ou de pathologiques mais ils sont assez rares chez le chien.

Un trouble ou une pathologie comportementale se soigne, un comportement canin gênant ou exagéré ne se soigne pas. Il s’observe, s’analyse et se déconstruit par changement des conditions et motifs qui en sont à l’origine. Bien entendu ceci est plus complexe et souvent plus long que l’application d’une posologie chimique.

5. Pouvez-vous donner quelques exemples de conseils en tant que comportementaliste canin ?

Je donnerai un exemple et le plus important, ceci sous forme de réflexion au service des maîtres.
La relation homme-chien est une drôle d’anomalie de la nature. Elle n’en est pas moins belle et fantastique et même nécessaire pour certains, mais elle n’est pas si simple.
Pour qu’elle soit la plus proche possible de l’harmonie et que chacun puisse s’y épanouir sereinement, elle doit répondre à deux conditions essentielles et indissociables, la connaissance et le respect de la différence.
Connaître, s’informer pour comprendre, permet de savoir que le chien a son identité propre, ses caractéristiques, ses codes, ses limites. Si ces éléments sont connus, compris et acceptés, ils permettent alors aux maîtres d’adapter leur mode relationnel à ce dont a réellement besoin le chien et pas l’inverse.
En tant qu’espèce capable de comprendre, d’apprendre qui est son chien et de raisonner, c’est l’homme qui peut et doit s’adapter. Il peut l’aimer, le chérir, lui donner toute la place qu’il souhaite lui accorder, à l’unique et stricte condition que cela se fasse dans le cadre de ce qu’est son chien et pas l’inverse.
La seconde condition d’une relation harmonieuse est donc le respect de l’autre et l’amour de l’autre, pas seulement de soi même. Il n’est possible de respecter l’autre qu’en le connaissant et en acceptant ses limites.
C’est le conseil majeur qui permet d’avancer vers la résolution de la plupart des problèmes et des questions que peuvent se poser les maîtres au sujet de leur chien.

6. Avez-vous quelque chose à ajouter ?

Pour conclure, je donnerai un conseil aux maîtres qui peuvent rencontrer un problème avec leur chien. Adressez-vous au bon professionnel en évaluant ses connaissances et compétences à travers son site, ses recherches, ses écrits et une prise de contact. Concernant les comportementalistes, dont l’activité n’est toujours pas réglementée, il existe le pire comme le meilleur. Il faut donc être attentif au parcours, à l’expérience, à l’approche et en vérifier la valeur. La seule description d’un intérêt marqué ou d’un amour inconditionnel pour les animaux n’est pas un critère de choix, on n’imagine pas qu’un professionnel du chien n’aime pas les animaux mais c’est tout à fait insuffisant. S’agissant du comportementaliste la description précise de son approche est essentielle. De même son intérêt et sa prise en compte de l’humain dans sa démarche doit être facilement mesurable. N’oublions pas qu’il travaille avec les maîtres et que cette dimension est essentielle dans sa recherche de résolution des problèmes de chiens.

Enfin le dernier conseil que je donnerai serait de ne pas faire l’économie d’une aide professionnelle si l’on n’a jamais eu de chien. Si cela peut paraître être un investissement, l’expérience montre que les gens guidés, conseillés et formés dès le début, à ce qu’est une vie avec un chien, sont largement récompensés de leur démarche. Au même titre que l’on fait vacciner son chien pour le protéger dès le plus jeune âge, il serait utile de former tous les maîtres à bien vivre avec un chien. Ceci aurait, n’en doutons pas, comme conséquence directe et visible de faire diminuer notablement le nombre de chiens en refuge et de maîtres en désarroi.
 
 
 
Merci beaucoup Eric pour votre témoignage ! Nous pouvons désormais mieux comprendre quel est le rôle précis du comportementaliste canin.
Vous pouvez retrouver le blog d’Eric en cliquant sur le lien suivant : blog comportementaliste canin.
 
 



Commenter cet article.